Traitement contre le diabète, entre fantasme et preuves scientifiques

Les publicités mensongères en ligne n’épargnent pas le domaine de la santé. Sur le diabète particulièrement, des prétendus remèdes miracles à base de plantes, des patchs anti-diabète, et des bagues thérapeutiques sont proposés aux publics. Ces supposés remèdes, dont les conséquences sont méconnues des populations, exposent les malades à des risques de complications. Qu’est-ce que le diabète ? Comment se manifeste-t-il ? Quels en sont ses facteurs de risque ? Comment l’éviter ou le traiter ?  Fasocheck tente d’y répondre à travers cette fiche d’information. 

Sur les réseaux sociaux, de fausses promesses sur des remèdes censés guérir “complètement” les patients diabétiques en un temps record sont largement diffusées. Avec des titres aguichants, ces posts, le plus souvent sponsorisés, prétendent faussement que le produit miracle est approuvé par des institutions sanitaires crédibles tels que le ministère de la Santé. Parmi ces remèdes, des patchs diabétiques, des plantes et même des bagues thérapeutiques sont fréquemment proposées aux internautes. Lassina Séré, médecin interniste et diabétologue au Centre Hospitalier Universitaire de Tengandogo, a témoigné avoir accueilli des patients victimes de ces arnaques. Selon lui, le phénomène s’explique par une méconnaissance des risques, ainsi que de la maladie du diabète par les populations.

 

Il n’existe pas encore de patch diabétique qui guérit le diabète.

C’est quoi le diabète ?

L’Organisation mondiale de la santé (OMS), définit le diabète comme une maladie chronique qui apparaît lorsque le pancréas ne produit pas suffisamment d’insuline, ou quand l’organisme n’utilise pas correctement cette insuline produite. L’insuline est l’hormone qui régule la concentration de sucre dans le sang. Selon le Dr Lassina Séré, diabétologue au centre hospitalier universitaire de Tengandogo, les personnes atteintes du diabète manifestent non seulement une soif intense, mais aussi une envie fréquente d’uriner, surtout la nuit. Ces personnes ressentent aussi une faim excessive et subissent une perte de poids, bien qu’ils aient une alimentation abondante, explique le diabétologue. A cela s’ajoutent des troubles de la vision et de la fatigue.

Selon le Rapport biennal 2022-2023 de l’OMS sur ses actions au Burkina Faso, qui cite lui-même le rapport d’enquête STEPS 2021, le taux de prévalence du diabète au Burkina Faso est passé de 4,9 % en 2013 à 7,6 % en 2021. L’enquête STEPS est un outil mis en place par l’OMS pour la surveillance des facteurs de risque des maladies non transmissibles. Les données de l’annuaire statistique 2023 du ministère de la Santé du Burkina Faso estiment à 26 340 le nombre de cas de consultation pour 470 décès enregistrés liés au diabète.

Les types de diabète 

Avec pour point commun l’augmentation du taux de sucre dans le sang, on distingue quatre types de diabète, à savoir le diabète de type 1, celui de type 2, le diabète gestationnel et d’autres types spécifiques de diabète.

Le diabète de type 1 ou diabète juvénile, se manifeste par une insuffisance de production d’insuline, indique l’Organisation panaméricaine de la santé (OPS) dans une fiche d’information. Selon Dr Lassina Séré, diabétologue au CHU de Tengandogo « chez les patients atteints de type 1, les cellules du pancréas responsables de la production d’insuline sont complètement détruites et Il n’y a donc plus de production d’insuline ».

Le diabète de type 2 ou diabète de la maturité est le type le plus courant et touche généralement les personnes adultes, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Il est caractérisé par une inefficacité de l’action de l’insuline produite ou une baisse de la production de celle-ci.

Le diabète gestationnel, lui, survient pendant la grossesse et se caractérise par un taux de sucre dans le sang supérieur à la normale, mais inférieur à celui posant le diagnostic de diabète. L’OPS explique que les femmes ayant un diabète gestationnel ont, non seulement un risque accru de complications durant la grossesse et à l’accouchement, mais également leur risque, ainsi que celui de leur enfant, d’avoir un diabète de type 2 à un stade ultérieur de leur vie, augmente également.

Pour les types spécifiques de diabète encore appelés diabètes secondaires, le Dr Julie Patricia Kamouni, médecin en santé publique, mentionne comme causes des maladies comme le cancer du pancréas, la prise de certains médicaments, mais aussi des anomalies génétiques.

Prise en charge du diabète 

Contrairement à ces publicités mensongères diffusées sur les réseaux sociaux, il n’existe pas, à ce jour, de médicaments traditionnels antidiabétiques bénéficiant d’une autorisation de mise sur le marché par le ministère de la Santé au Burkina, a indiqué l’Agence nationale de régulation pharmaceutique (ANRP) à Fasocheck. Le secrétaire général de la Fédération nationale des associations des praticiens de la médecine, Philippe Beogo, contacté par Fasocheck, a également reconnu qu’il n’existe en leur sein aucun remède “traditionnel” permettant de soigner définitivement le diabète. Il souligne cependant que certains d’entre eux disposent de produits qui aident à la prise en charge du diabète.

A l’exception des diabètes de types spécifiques et gestationnels, ceux de types 1 et 2 ne peuvent être guéris définitivement. Le diabétologue Lassina Séré a expliqué que  le diabète gestationnel peut disparaître après la grossesse, tandis que les diabètes de types spécifiques peuvent être guéris si les causes de l’hyperglycémie sont identifiées et traitées.

La prise en charge du diabète, comme le souligne Julie Patricia Kamouni, médecin en santé publique, est axée sur plusieurs volets, à savoir l’éducation thérapeutique du malade, les mesures diététiques, l’activité physique et la prise de médicaments. « Le traitement du diabète de type 1 repose sur l’administration quotidienne d’insuline, l’organisme ne pouvant plus la produire naturellement ; tandis que celui du type 2 exige la prise de médicaments aidant à améliorer l’action de l’insuline sur les cellules, ce qui permet de réguler le taux de sucre dans le sang », a-t-elle expliqué.

Il n’existe pas encore de patch pour les diabétiques

A ce jour, il n’existe pas de patch faisant partie de la prise en charge du diabète, met en garde le Dr Lassina Séré. Le médecin diabétologue explique que les médicaments disponibles sont des antidiabétiques oraux et injectables.

Les recherches menées par Fasocheck sur le patch diabétique ont permis de retrouver une étude mise en ligne le 22 juin 2015 par un groupe de chercheurs de l’Université de Caroline du Nord  et de l’Université d’État de Caroline du Nord, annonçant la mise au point d’un « patch d’insuline intelligent » utilisant des micro-aiguilles indolores. Ce patch, encore en phase expérimentale, détecte les niveaux élevés de glucose et délivre l’insuline nécessaire, offrant ainsi une alternative aux injections douloureuses.

Les tests ont été réalisés uniquement sur des souris et des études précliniques sur des porcelets sont prévus, avant de passer aux essais cliniques. « En cas de succès, nous testerons le patch sur des humains. Il faudra plusieurs années, probablement 3 à 4 ans, avant de procéder à des essais cliniques potentiels », a expliqué le Dr John Buse, l’un des instigateurs de l’étude, dans un compte rendu publié par la Proceedings of the National Academy of Sciences (Traduction: Académie américaine des sciences, Ndlr) .

Les diabétiques sont-ils privés de sucre ?

Contrairement à une idée largement répandue, les personnes atteintes de diabète ne sont pas totalement privées du sucre. « Il n’y a pas d’interdits en matière de régime pour les diabétiques. Le sucre n’est pas complètement interdit, mais il est déconseillé lorsque la glycémie est élevée », rassure le Dr Séré. Il conseille néanmoins d’éviter les sucres dits « rapides » ou « ajoutés » comme le jus sucré, l’alcool, le sucre, les boissons gazeuses raffinées qui augmentent rapidement le taux de glycémie. La consommation d’aliments riches en sucres lents, tels que les céréales et les tubercules, ainsi que ceux apportant peu de calories à l’organisme comme les fruits et les légumes, sont recommandés selon le diabétologue. 

Les facteurs à risque du diabète

Plusieurs facteurs sont à l’origine du diabète. Selon le Dr Julie Patricia Kamouni, spécialiste en santé publique, on distingue deux types de facteurs : les “modifiables” et les “non modifiables”. Les facteurs modifiables, explique-t-elle, incluent le surpoids, l’obésité, la suralimentation et le manque d’activité physique. Novo Nordisk, entreprise spécialisée dans le traitement du diabète, ajoute à cette liste l’alimentation riche en graisses et en sucres, le tabagisme, la prise de certains médicaments et des pathologies comme l’hypertension. Parmi les facteurs non modifiables, l’OMS cite la génétique et l’âge.

De graves complications par manque de suivi

Selon l’Organisation panaméricaine de la santé (OPS),  avec le temps, le diabète peut endommager le cœur, les vaisseaux sanguins, les yeux, les reins et les nerfs, multiplier par 2 ou 3 le risque chez l’adulte de souffrir d’accidents cardiaques ou vasculaires cérébraux, ou mener à l’amputation des membres.

Dr Lassina Séré insiste sur le caractère insidieux de la maladie, qui fait qu’elle est souvent détectée tardivement. « La plupart des personnes qui viennent avec des complications ont une plaie qui ne guérit pas, qui va aboutir  à des amputations   Cela s’explique par le fait que le diabète a détruit tous les vaisseaux », témoigne-t-il. 

Tiomité Da

Rabiatou Congo

Fasocheck

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