Affirmation

Sur le réseau social TikTok, une vidéo virale et amateure prétend que "plus de 5000 prisonniers" ont été libérés au Burkina Faso” par le président. L'auteur présente une photo censée être la preuve de sa déclaration.

Auteur
Oudou22607 sur Tiktok
Verdict
Faux
Faux, cette photo n’est pas celle de 5000 prisonniers libérés par la justice burkinabè. Elle a été prise le 22 septembre 2024, dans la prison de Makala, en République Démocratique du Congo, où plus de 1600 détenus malades ont été libérés. De plus, le Burkina Faso n’a pas libéré 5000 détenus de ses prisons.


Alors que le gouvernement burkinabè a adopté au conseil des ministres du 19 septembre 2024 un projet de loi pour désengorger les prisons nationales, une vidéo publiée sur TikTok présente une photo prétendant montrer plus de 5000 prisonniers déjà libérés.

Capture d’écran de la publication de Oudou22607

 

Une vidéo de 1m54s publiée sur Tiktok le 23 septembre 2024 par le compte Oudou22607 suivi par plus de 13 000 personnes, affirme que “plus de 5000” prisonniers ont été libérés au Burkina Faso. Dans sa vidéo, l’auteur apporte comme preuve une photo sur laquelle l’on aperçoit un groupe de personnes assises à même le sol. La majorité est torse nu et certains ont les jambes blessées. Ces personnes sont, selon lui, des prisonniers libérés sous l’ordre du président burkinabè. La publication a récolté, à la date du 30 septembre 2024, plus de 16 000 likes, 763 commentaires et plus de 1500 partages.

Le Burkina Faso a-t-il réellement libéré plus de 5000 prisonniers ? Fasocheck a vérifié.

Faux, le Burkina n’a pas libéré 5000 détenus pour désengorger les prisons/ Montage : Fasocheck

La photo provient de la République Démocratique du Congo

A partir d’une capture d’écran de la photo présentée comme des prisonniers libérés au Burkina Faso, Fasocheck a effectué des recherches inversées avec l’outil Google reverse image. Les résultats ont montré que la photo a été publiée pour la première fois depuis le 22 septembre 2024 sur la page Facebook du Ministère de la Justice de la  République Démocratique du Congo. Selon l’institution, il s’agit d’une opération de «libération de 1685 prisonniers malades graves à la Prison de Makala». Makala est un centre pénitencier situé dans la capitale de Kinshasa.

Sur les photos originales reprises par plusieurs autres médias congolais (1, 2, 3, 4), on peut apercevoir en bas et à droite la signature du ministère de la Justice du pays. Le site d’information investigateur.net qui a rapporté l’information, ajoute que cette opération fait partie d’un processus de désengorgement des prisons entamé par le gouvernement congolais depuis juillet 2024.  Quatre cents (400) autres prisonniers avaient été libérés de la prison de Makala et des centaines d’autres ont été relâchés dans certaines prisons du pays.

Capture d’écran de l’image originale publiée sur la page Facebook du ministère de la Justice congolais.

 

Au Burkina, un projet de loi en cours pour désengorger les prisons

Avec une capacité d’accueil totale de 5228 places pour 28 centres pénitenciers, le système carcéral du Burkina comptait 8800 détenus, dont 8640 hommes et 160 femmes, au 31 décembre 2022, selon l’annuaire statistique 2022 du ministère de la Justice (P.185). Le taux d’occupation des prisons à cette date était de 163,8%. Parmi ces détenus, 6165 ont été déjà condamnés contre 2635 qui attendaient toujours leur jugement.

 

 

Au Burkina Faso, le gouvernement a adopté, au Conseil des ministres du 19 septembre 2024, un projet de loi portant institution du travail d’intérêt général pour désengorger les prisons. Selon le ministre de la Justice, Edasso Rodrigue Bayala, ce projet de loi propose une peine alternative à l’emprisonnement et répond à la nécessité de remédier à la surpopulation carcérale et de favoriser la réinsertion sociale des condamnés. L’idée de créer une justice bâtie sur les traditions africaines en remplaçant certaines peines d’emprisonnement en travaux d’intérêt public, avait été émise par le Capitaine Ibrahim Traoré, dans un entretien (1h 15è mn) diffusé à la radiodiffusion télévision du Burkina, le 03 février 2023.

Contacté par Fasocheck, Djibrihina Ouédraogo, professeur agrégé en droit public et enseignant-chercheur à l’Université Thomas Sankara, a déclaré n’avoir aucune information concernant la libération de prisonniers au Burkina Faso. Par ailleurs, a-t-il nuancé, le texte proposé en conseil de ministre n’est encore qu’au stage de projet, et n’est pas encore validé par l’Assemble législative. Et “ une fois devenue loi, l’application est conditionnée par la promulgation préalable du texte par le président du Faso, chef de l’État”, a-t-il précisé. 

Selon la constitution Burkinabè, un projet de loi naît d’une initiative gouvernementale, alors qu’une proposition de loi est le fruit d’une idée émise par un parlementaire.

Conclusion

La vidéo annonçant la libération de plus de 5000 prisonniers au Burkina Faso est fausse. L’image présentée comme celle des prisonniers burkinabè libérés a été prise en République Démocratique du Congo, libérés de la prison de Makala, à Kinshasa.

Tiomité Da

Correction et édition Ange Lévi Jordan Méda

Fasocheck